Riflessioni sul Perdono, sulla Dignità e sulla Riconciliazione
Marek Halter

1. I negoziati di pace, generalmente, sono incentrati sulle dimensioni politica ed economica. Quale è la Sua percezione della necessità di toccare aspetti più profondi e genuini della riconciliazione e come si può ottenere questo?
Il y a la paix qui est imposée par le haut et il y a la paix qui imposée par la base. En général ce sont les dirigeants des pays en conflits qui négocient la paix selon leurs intérêts économiques et géopolitiques. Dans ce cas, la pression des pays ou des groupes “amis”, ceux qui permettent aux belligérants de poursuivre la guerre, jouent un rôle essentiel. Dans un sens comme dans l’autre. Quant à la paix imposée par les peuples, par les opinions publiques, elle résulte tout d’abord de la fatigue, de l’épuisement. Hérodote disant qu’en temps de paix ce sont les fils qui enterrent leurs pères et en temps de guerre, c’est le contraire. Combien de générations de parents accepteraient-elles de continuer à enterrer leurs enfants?
Toutes les guerre finissent par la paix. Même celles, comme en Europe, qui ont duré cent ans.
2. Quali sono le condizioni nelle quali, al di là dell’assicurare gli interessi della parti in conflitto, può essere stabilito un processo incentrato su un senso di equità e dignità?
Quand on parle des conditions dans lesquelles une paix paraît possible, par exemple entre les Israéliens et les Palestiniens, on pense tout d’abord à la situation politico-économique dans le monde en général, et dans la région en particulier. On ne pense que rarement à la situation psychologique des peuples en guerre. Car même si toutes les conditions étaient requises pour arriver à une solution pacifique, il suffirait d’un attentat d’un côté, ou d’une déclaration belliqueuse de l’autre, pour que les opinions publiques s’enflamment et que leurs gouvernants se retrouvent dans l’impossibilité de poursuivre la négociation.
En revanche, dans ce domaine, dans le domaine des reconnaissances mutuelles par le bas, ce que vous appelez la réconciliation (je n’aime pas le mot “forgiveness”) nous, simples militants de la paix, nous pouvons beaucoup. Nous l’avons fait dans les années 90. Notre action alors a abouti aux accords d’Oslo et à la fameuse poignée de mains entre Rabbin et Arafat. C’était un geste symbolique de la réconciliation par excellence. Etant très proche de l’un et de l’autre, je ne jurerais pas qu’ils se soient pardonnés, quoiqu’il en fût. La réconciliation dans ce cas suffisait et sans l’assassinat d’Itzhak. Rabbin par un fanatique Juif, on aurait pas eu besoin de ce colloque car la paix aurait régné au Proche-Orient.
3. Quanto il perdono è essenziale alla dimensione della riconciliazione? Alla radice della Sua cultura politica e/o della Sua fede religiosa quali sono i principi che implicano o escludono il perdono? Quali versi o detti che fanno parte del Suo personale patrimonio spirituale possono, nella sua opinione, avere un significato universale
La signature de paix fait souvent partie d’une stratégie. On la maintient par la suite par intérêt. La réconciliation ne vient pas avant mais après l’arrêt des hostilités. J’ai dit tout à l’heure que je n’aimais pas le mot “forgiveness” (pardon) qui est une notion religieuse. Pour pardonner ou pour demander pardon, il faut pouvoir faire le bilan des dommages occasionnés par chacune des parties. Car si on demande pardon, il faut préciser le crime. Si le crime est important, on relance l’hostilité, s’il ne l’est pas, il ne vaut pas le pardon.
Dans un conflit, comme celui qui oppose les Israéliens et les Palestiniens, entre deux peuples qui réclament la même terre, si crimes il y a, ils sont bien partagés. Et si ce n’était pas le cas, on occuperait les négociateurs à comptabiliser les offenses. Dangereuse démarche.
4. Il perdono richiede qualche forma di pentimento da parte di coloro a cui il perdono viene offerto? Il perdono ha condizioni o è senza condizioni?
Votre dernière question renforce mes propos précédents. Le pardon exige repentance dites-vous. Connaissez-vous un seul cas dans l’histoire de l’humanité où cette démarche fut appliquée. Il est dangereux d’exiger des hommes à devenir des anges. Même le Christ ne l’a pas fait. Ce que demande le monothéisme, par la voix de ses trois grandes religions, c’est le respect de l’autre. En partant du principe que nous sommes tous faits à l’image du Créateur : blancs, jaunes, noirs, gros, maigres, Juifs, Chrétiens, Arabes …
Tuer l’autre, c’est tuer notre part de Dieu en lui. Si cela est votre idée, alors j’y adhère. Mais soyez réaliste : on ne fait pas la paix parce que par miracle on se met à aimer son ennemi, après avoir espéré pouvoir l’anéantir. Non, il ne s’agit pas d’amour, ni de pardon, ni par conséquent de repentance. Il ne s’agit que de respect. Apprendre à respecter l’autre parce qu’il est comme moi, qu’il a droit à une maison parce que j’ai une maison, à une terre parce que j’ai une terre, à un État parce que j’ai un État. Et si de surcroît, on peut partager avec l’autre un morceau de pain afin qu’il ne meure pas de faim, quel bonheur ! C’est cela la solidarité. On en parle aussi bien dans la Thora, dans les Evangiles que dans le Coran.
Le respect lui, vient de la connaissance de l’autre. Dans ce domaine nous, les militants de la paix, nous pouvons plus que nos dirigeants. Nous avons instauré les premiers dialogues entre les Juifs et les Arabes, les Israéliens et les Palestiniens. Il n’y a pas si longtemps, j’ai accompagné un convoi pour la paix à Gaza. J’ai emmené avec moi deux imams et un rabbin. Nous avons distribué des vivres aux enfants palestiniens ainsi que des lettres des enfants de Sdérot. Puis, avec le rabbin et les imams, nous avons appris aux centaines d’enfants de Gaza une chanson en hébreu qui parle de paix. Et des hommes du Hamas en armes applaudissaient. Mais pour applaudir, il fallait qu’ils lâchent leurs kalachnikovs.
J’ai toujours cru que la parole était plus forte qu’une mitraillette. C’est pour cela que j’ai accepté votre invitation.